Et si l’évangile selon saint Marc avait été écrit par une femme, comme l’imaginent François Vouga et Carmen Burkhalter, les auteurs du récent ouvrage: « L’évangile d’une femme. Une lecture de l’évangile de Marc! »

Leur hypothèse de travail n’est pas loufoque. A méditer l’extrait que nous propose la liturgie pour ce dimanche, on pourrait même trouver des indices allant dans le sens de leur hypothèse.

Jésus donne une réponse aux douze qui ont discuté entre eux pour savoir qui était le plus grand. L’Evangile selon saint Marc nous dit: 

« S’étant assis, Jésus appela les douze et leur dit: ‘Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous.’ » (Mc 9, 35)

Réponse très claire: le premier est celui qui se fait le serviteur de tous. Et pour illustrer sa réponse et pour bien montrer que tous doivent être servis, mêmes les petits et les humbles, les exclus et ceux qui ne comptent pas, Jésus fait un geste que nous décrivent les trois évangiles selon Mt, Mc et Luc: « Prenant alors un enfant, il le plaça au milieu d’eux… » Seul l’évangile selon saint Marc remarque que Jésus « l’embrassa »; et pour nous décrire ce geste, il emploie un verbe que lui seul utilise dans le Nouveau Testament, à savoir « enagkalisamenos »: « prendre avec tendresse dans ses bras ». 

S’il était vrai que l’évangile selon saint Marc aurait comme auteure une femme, nous pourrions dire: Oui, les femmes ont un autre regard sur la réalité, elles nous font voir des gestes et des réalités qui pour les hommes passeraient peut-être inaperçus. 

Par l’ajout de ce verbe, l’évangile selon saint Marc ne nous dit pas seulement qui doit être servi mais encore comment: tous, surtout les petits et les exclus, ceux qui ne comptent pas, doivent être servis avec tendresse et amour. 

Remarquons encore quel mot l’évangile selon saint Marc utilise pour dire « serviteur ». Ce n’est pas le mot habituel « doulos » ou « pais », mais bien « diakonos », diacre, donc ce terme qui à l’époque de la rédaction de l’évangile désignait déjà un ministère dans l’église.

Et l’évangile selon saint Marc, peut-être écrit par une femme, nous rappelle par les mots et les gestes de Jésus que celui qui veut être le premier, doit être un ministre qui sert avec tendresse et amour aussi les humbles et les petits. 

Rien ne s’oppose à ce que l’auteur de l’évangile selon saint Marc ait été une femme: d’ailleurs l’Eglise ne parle pas de l’évangile DE saint Marc, mais bien de l’évangile SELON saint Marc. Et cette expression fait bien comprendre que ce n’est pas nécessairement saint Marc qui a tout écrit lui-même: il a peut-être demandé à une femme de construire à partir de ses prédications un évangile. Surtout que les femmes recevaient au premier siècle après Jésus Christ dans la société romaine une bonne éducation et beaucoup d’entre elles publiaient des textes et poèmes qu’elles avaient écrits. 

Rédigé par un homme ou par une femme, en dernière analyse peu importe: l’évangile reste toujours pour les chrétiens la Parole du Dieu vivant.

Bon dimanche!

Le commentaire du Père Jean-Jacques Flammang SCJ paru dans le Luxemburger Wort

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