Voici un extrait de l’homélie de Mgr Michel Aupetit, archevêque de Paris

La vie sur terre est un « prologue », un temps donné pour apprendre l’ « alphabet divin ».

J’aime beaucoup ce mot d’ « alphabet divin » parce qu’il n’est pas de moi : il est de Mgr Favreau* qui m’a précédé dans le diocèse de Nanterre. Il disait que notre vie sur la terre consiste à « apprendre l’alphabet divin ». Et l’alphabet divin, c’est l’alphabet de l’amour. Eh oui, en réfléchissant à ce beau mot, de mon anté-prédécesseur à Nanterre**, je me dis au fond qu’il faut l’apprendre tout entier cet alphabet. Eh oui, parce que… commençons par la lettre A.

La lettre A, eh bien, je dirais c’est l’amour de soi. Mais cela va de soi ! Qui d’entre nous ne s’aime pas ? Sinon, s’il possède une pathologie comme la dépression… mais tout le monde s’aime [soi-même]. Première lettre, « A » : « Je m’aime ».

Deuxième : « B ». Ah, « B » c’est peut-être l’amour de nos parents quand nous sommes aimés par eux depuis la naissance. Spontanément, naturellement, cet amour nous vient.

« C » ! Ah, la lettre « C », c’est quand on élargit son amour sans doute à ceux qui vont plus loin, à nos amis par exemple. Vous voyez que dans cet alphabet, l’A,B,C est accessible à tous. Mais dans un alphabet, il faut aller jusqu’au bout : A, B, C, D… Z ! C’est quoi la lettre « Z » ? Il faudra, frères et sœur, aller jusqu’à la lettre « Z » et la lettre « Z », je crois, consiste à aimer ses ennemis comme le fit Jésus.

Devant le mystère du mal et de la haine, devant nos incompréhensions, la colère des injustices, il n’y a pas d’autre remède, pas d’autre remède, que d’aller jusqu’à la lettre « Z ». Et de demander à Dieu de toutes ses forces d’aimer comme Jésus, d’aimer ses ennemis. Sinon, c’est que nous ne le suivons pas.

Et ce qui permet de comprendre les mots de cet alphabet, c’est d’écrire une page d’Evangile , eh bien, c’est l’amour de Dieu qui nous permet de tout comprendre, de tout saisir et de le vivre.

Vous voyez, frères et sœurs, on se méprend souvent sur ce qu’est une vie réussie ou une vie ratée. Une vie réussie, c’est l’accomplissement de cet apprentissage de l’alphabet divin qui nous prépare à la vie, à la vie en abondance, celle pour laquelle j’ai donné personnellement ma vie au Christ et à son Eglise. Et que j’ai prise d’ailleurs comme devise épiscopale, que l’on trouve dans l’Evangile de saint Jean, dans la bouche de Jésus : « Je suis venu pour qu’ils aient la vie, la vie ne abondance », pas la vie étriquée, la vie ne abondance, celle où l’on a appris jusqu’au bout l’alphabet divin.

Nous attendons le retour du Christ et nous sommes dans le Temps de l’Avent, mais le retour du Christ achèvera toute chose dans l’amour.

Il y a deux mille ans, hélas, certains n’ont pas reconnu le Messie qu’ils attendaient. Nous, frères et sœurs et chers amis, ne fuyons pas sa présence, ne ratons pas son retour. Il vient au cœur du monde, au cœur du peuple de Dieu, au creuset de la foi des fidèles. Ceux-là qui manifestent par leur baptême le Royaume « déjà là », comme les personnes consacrées témoignent par leur vie du Royaume à venir. Et nous, prêtres, ministres ordonnés, diacres, évêques, nous ne sommes là qu’au service, au service pour faire advenir et transmettre les dons de Dieu qui permettent de le vivre.

Oui, je le crois, c’est dans le secret de tous les cœurs que Dieu vient au monde et c’est là que je l’ai découvert. Dans le cœur des plus faibles, des personnes vulnérables, des pauvres, j’ai reconnu la présence du Seigneur. Je le reconnais dans chacun de vous qui ouvrez vos cœurs à la présence de Dieu, ici, maintenant. Puissions-nous le vivre vraiment et nous aider les uns les autres à le vivre ensemble.

Catégories : HoméliesLiturgie