Qui aime sa vie la perd ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle. « L’existence peut être considérée comme mienne et je peux vouloir l’étreindre et la conserver comme si elle se suffisait à elle-même ou s’épuisait en elle-même, bien unique à défendre à tout prix, propriété ne dépendant que de moi. Or, alors, elle m’échappe comme l’eau que je voudrais retenir avidement dans mes mains, alors que je ne puis maitriser sa source et que sans cesse elle s’écoule. A l’inverse, si je ne m’agrippe pas à cette existence, si j’accepte de m’ouvrir à l’Autre et donc de mourir à ce qui me replie sur moi-même, voici que cette « mort » n’est autre qu’une « extase » et mon existence ainsi ouverte se maintient pour de bon, selon Jésus, en « vie éternelle » », remarque Léon-Dufour dans sa Lecture de l’Evangile selon saint Jean.
N’avons-nous pas l’impression parfois que notre vie s’arrête durant le temps des confinements, puisqu’elle manque la dimension relationnelle ? C’est ainsi que nous comprenons mieux cette parole qui semble paradoxal de Jésus : « Qui aime sa vie la perd ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle ». Car selon saint Jean, la vie éternelle, sans être limitée par le temps ou l’espace, est avant tout la vie en relation, la vie de communion avec Dieu même.
N’est ce pas dans ce sens-là que Dieu veut mettre une Loi au plus profond des hommes ? Il veut même l’inscrire sur leur cœur. Quelle est cette loi du cœur sinon la loi de miséricorde, la loi de ceux et de celles qui sont prêts de se faire proches et de venir en aide des personnes qui en ont besoin comme le montre le bon samaritain ?
Devant un homme blessé, gisant au bord de la route, un prêtre et un lévite le voient. Ils passent de l’autre côté, soit parce que la loi d’impureté leur interdit le contact, soit parce qu’ils sont occupés par d’autres responsabilités. Le samaritain, quant à lui, est saisi de compassion. Devant l’urgence de sauver une vie, quelle loi il faut suivre sinon celle du cœur ?
Le propre du cœur, c’est d’aimer. Il peut être aussi le lieu d’égoïsmes, de jalousie, de haine… il a donc besoin sans cesse d’être purifié. Crée en moi un cœur pur, o mon Dieu, demande le psalmiste. Jésus a béni aussi les cœurs purs, car ils verront Dieu.
Un cœur pur peut voir plus clairement les choses de Dieu, mais aussi les périls pour son existence. Comme dit le Père Léon Dehon, fondateur de la Congrégation des Prêtres du Sacré-Cœur: ce sont « les périls de la part de la société qui est toute aux intérêts matériels et aux plaisirs » ; les périls de l’indifférence religieuse et de l’indifférence humaine tout court (NHV, 9,126).
Je termine par cette phrase que Dehon a mis dans la bouche de Jésus. « Qui ose imposer des lois à mon amour ? Non, mon amour ne connaît point de loi ; je veux me donner en gage au monde, pour mieux établir la paix entre Dieu et les hommes. »
P. Dominique AI LONG VU scj