« Ô Père, dans tes mains je remets mon esprit.»
Un impressionnant silence et une profonde méditation caractérisent ce jour ! Oui, aujourd’hui est le jour du grand silence ; mais pas d’un silence d’oubli ou d’indifférence. C’est un silence qui parle, qui crie, un silence fait de paroles qui retentissent, d’amour qui se répand, de miséricorde qui se multiplie.
Oui, c’est le moment de contempler le grand mystère d’un Dieu qui meurt pour les hommes, un Dieu qui se humilie jusqu’à la mort, et mort de croix. C’est le signe de l’amour suprême, de l’amour infini, d’un amour qui n’est pas à notre mesure humaine.
Cette Parole de Dieu nous fait plonger dans le plus intime du mystère de notre salut. Jésus est le Serviteur humble du Seigneur qui marche vers le Calvaire sous le lourd poids de la Croix. Selon l’image présenté par Isaïe, il marche tout seul, abandonné de tous, méprisé, si défiguré qu’il ne ressemble plus un homme. Maltraité, il s’humilie, il n’ouvre pas la bouche : comme un agneau conduit à l’abattoir, comme une brebis muette devant les tondeurs, il n’ouvre pas la bouche.
La passion de Jésus Christ selon saint Jean est une des pages les plus impressionnantes de toute la Sainte Écriture. Je pense qu’il devient naturel, pendant la narration, que chacun de nous se sent partie de l’histoire. Elle n’est pas une histoire lointaine ou inconnue de nous : elle nous appartient et nous lui appartenons. La Croix que Jésus porte est notre croix. Ce sont nos souffrances qu’il porte, nos douleurs dont il est chargé. La Croix est lourde et le chemin difficile, Il tombe une fois, deux fois, trois fois ; Il se relève chaque fois, Il y a un chemin à parcourir, une mission à accomplir.
Aujourd’hui Jésus continue à parcourir le chemin de nos calvaires, Il marche sur nos routes, Il passe par nos rues et nos places, Il vient à la rencontre des perdus, des souffrants et des marginalisés de nos périphéries. Ses gestes et ses regards de tendresse, de compassion et de pardon sont envoyés à nous, à chacun de nous. Il tend la main aux pécheurs, aux aveugles, aux boiteux, aux lépreux de notre temps ; son regard d’amour se fixe en tous les angoissés et désespérés de ce monde.
Le silence de Jésus est touchant : il ne répond pas à ceux qui l’offensent et maltraitent, il souffre, il marche résolut vers le Calvaire, pour l’acte suprême d’amour pour l’humanité.
Sur la Croix, Jésus a encore un dernier souffle d’amour pour nous offrir le mieux des testaments : sa mère ! «Femme, voici tons fils.» Puis il dit au disciple : «Voici ta mère.» C’est notre mère, Dame des Douleurs, qui jamais abandonne son Fils et ses fils, qui l’accompagne dans l’heure terrible de la mort sur la Croix, qui nous accompagne dans toutes nos heures de souffrance et de douleur. C’est la mère qui nous jette son regard de tendresse et d’amour maternel, qui soigne nos blessures et qui accueille nos angoisses et nos douleurs.
Jésus donne son dernier souffle, il livre sa vie dans les mains du Père, il la livre pour nous, nous tous. Le soldat lui perça le côté avec une lance et Jésus donne pour nous la dernière goutte de sang et d’eau, donne toute sa vie. De ce côté percé par la lance naît l’Église, naît la communauté des disciples, qui se nourrira des sacrements de vie nouvelle, qui se nourrira de l’eau vivante du baptême et du corps et du sang de l’Alliance nouvelle et éternelle de l’Eucharistie.
L’heure est tragique, est dramatique, mais n’est pas la fin ! À ce moment-là, la Croix devient un instrument de salut et de rédemption, elle est l’arbre de vie dont le fruit est désormais offert à toute l’humanité. C’est par cela que nous irons accueillir et vénérer la Croix, car elle ne signifie pas une mort à toujours, mais une vie définitive. Près de la Croix se tenaient Marie et le disciple aimé, près de la Croix se tient toute l’humanité. Les bras ouverts de Jésus sur la Croix sont l’étreinte éternelle de Dieu à tous les hommes de tous les temps. Oui, le moment est de profonde contemplation, de prière et de méditation. Recueillons-nous, restons en silence, à intérioriser, à garder dans le plus profond de nos cœurs cet extraordinaire moment de notre foi et de notre salut.
P. José Agostinho Sousa, scj.