Mgr André Léonard, maître de vérité chrétienne et guide sûr en des temps de grande confusion

En 2020 Mgr André Léonard, archevêque-émérite de Bruxelles et ancien professeur de philosophie moderne et de métaphysique à l’Université catholique de Louvain, a fêté son 80e anniversaire. A cette occasion, un gros volume lui a été offert qui porte le titre rappelant le programme de toute une vie : « Montrer aux hommes le chemin qui mène au Christ »[1]

Ces Mélanges édités par Eric Iborra et Isabelle Isebaert s’ouvrent sur une Lettre du pape émérite Benoît XVI qui souligne les grandes qualités intellectuelles, pastorales et humaines du jubilaire qui a su « porter l’archidiocèse de l’intérieur en souffrant pour l’Église et, à travers le renoncement à la fonction extérieure, travailler de l’intérieur pour l’Église de Belgique, selon la volonté du Seigneur, en offrant votre amour et votre souffrance. » Et Benoît XVI de conclure : « Pour ce renoncement et l’abnégation qu’il exige, je voudrais vous remercier de tout cœur. »

André Léonard était d’abord professeur de philosophie, et quel professeur ! « Un des esprits les plus brillants de Belgique » avait écrit il y a plusieurs années un grand philosophe français, et tous ceux qui avaient la chance, la joie et l’honneur d’être ses étudiants souscrivent sans doute à cette appréciation.

Mgr André Léonard

Les Mélanges reviennent donc en plusieurs sections sur sa carrière universitaire. A l’éminent connaisseur et interprète de Hegel est d’abord consacrée une section sur l’idéalisme allemand avec des études de Gilbert Gérard et d’Olivier Depré sur l’interprétation de la pensée hégélienne et une contribution sur la foi selon Schleiermacher d’Emilio Brito, un autre géant de la philosophe contemporaine.

Suivent deux sections sur la métaphysique et la morale, deux domaines que Léonard connaît très bien, qu’il a magistralement enseignés dans les grands auditoires de Louvain et de Louvain-La-Neuve et sur lesquels il a publié des livres et de nombreux articles. 

La section « Vérité, don et amour » revient sur l’originalité de la pensée métaphysique d’André Léonard, différente de celle des « caciques du thomisme français », car elle s’inspire de Hans Urs von Balthasar pour développer une ontologie de « l’être comme ressemblance de Dieu » à la suite de Gustav Siewerth (1903-1963), alors inconnu en France et en Belgique. Avec Ferdinand Ulrich (1931-2020), un autre philosophe encore moins connu que Siewerth, Léonard ouvre à ses étudiants et lecteurs une voie tout à fait nouvelle d’un « penseur à couper le souffle venu d’au-dessus de toute mêlée et qui apparaîtra sans aucun doute dans quelques décennies comme une gloire du XXe siècle chrétien » (E. Tourpe). Les Mélanges consacrent deux études à Ulrich, celle de l’excellent Emmanuel Tourpe et celle de Jacques Servais sj, grand connaisseur de Hans Urs von Balthasar. Dans cette section métaphysique, on peut lire aussi la contribution de Mgr Pascal Ide sur la typologie des pensées à la lumière de l’amour-don, celle d’Edouard-Marie Gallez sur l’analogie inductive, celle de Bernard Pottier s.j. sur l’homme et la femme chez Balthasar, encore celle de Stéphane Mercier sur l’amour comme clé herméneutique des Écritures, celle de Philippe-Marie Margelidon o.p. sur les preuves de Dieu selon André Léonard et celle d’Éric Iborra sur la charité comme cœur de la métaphysique et de l’apologétique chrétiennes.

Toutes ces contributions montrent que « le plus rationnel et le plus logique des philosophes belges est d’abord le plus tendre et le plus attentifs des pères » et que pour lui « l’être est amour et non pas seulement idée » (E. Tourpe). 

La section « Dignité et vocation de l’homme » est consacrée à la morale et contient des contributions d’éminents professeurs et penseurs comme le cardinal Angelo Bagnasco, Mgr Michel Schooyans, Remi Brague, Michel Ghins, Mgr Wladyslaw Zuziak, Francis de Chaignon, Zdzislaw Kijas o.f.m. conv., Herman de Dijn, Catherine Brochier et Drieu Godefridi. Ils parlent tous de la dignité humaine, de l’éthique et de la bioéthique, de la personne humaine, de sa vocation et de la sainteté, mais aussi des défis et des dangers du positivisme juridique ou encore des évolutions malthusiennes et environnementalistes dont l’écologisme cohérent favorise une « culture de la mort – la mort de l’homme, pour que domine la Nature déifiée » (Drieu Godefridi). Tous ces thèmes, Léonard les a abordés dans ses cours de 1970-1990, et aussi dans ses nombreuses prises de position comme évêque de Namur et archevêque de Bruxelles. 

Une autre section « Un monde déchu – destruction de l’harmonie originelle » rassemble les contributions de Florent Urfels sur les conséquences cosmiques du péché originel, de Mgr Giampaolo Crepaldi sur l’écologie humaine et écologisme, de Joseph-Marie Verlinde sur l’ivresse de la démesure et de Brice de Malherbe sur la bioéthique et l’écologie intégrale. 

La section « Art et littérature » regroupe deux articles, un de Jean-François Thomas s.j. sur l’œuvre de Philippe de Champaigne et l’autre de Guillaume de Menthière sur la dimension théologique du roman « Augustin ou le Maître est là » de Joseph Malègue. 

Deux autres sections réfèrent à Mgr André Léonard comme prêtre exemplaire et pasteur infatigable qui n’a cessé de « montrer aux hommes le chemin qui mène au Christ ». 

Sous le titre général de « Sacerdoce, liturgie, prédication » les éditeurs ont rassemblé les contributions du cardinal Gerhard Müller sur le ministère sacerdotal dans le monde d’aujourd’hui, de Mgr Pierre Warin, actuel évêque de Namur, sur le sacerdoce du Christ, de Jacques de Longeaux sur la paternité de Joseph, modèle de la paternité du prêtre, et encore les articles de Jean-Pierre Gac sur le courage de l’apôtre, de Michel-Marie Zanotti-Sorkine sur les sept paroles de Marie et sept paroles de Jésus au Mont Golgotha, de Stephan Würges s.j.m. sur différentes conceptions de célébrer l’eucharistie et de Mgr Joris Schröder sur la retraite que Mgr Léonard avait prêchée en 1999 an Vatican. 

La dernière section reprend comme titre la devise de Mgr Léonard « Veni Domine Jesu » et contient une contribution sur les béatitudes de Joël Rochette, une autre d’Isabelle Isebaert sur les fins dernières en relation avec Jacques de Saoug et d’Ephrem de Nisibe et une dernière d’Alain Y. Thomasset a.a. sur la venue du Seigneur dans les sermons de saint John Henry Newman. 

Dans l’imposant volume de 670 pages on trouve aussi les Jalons biographiques du jubilaire ainsi que sa bibliographie. Par la diversité et la richesse de ses contributions, ces Mélanges présentent et continuent l’œuvre du jubilaire et sont ainsi un bel hommage et un témoignage de gratitude à celui qui fut et est encore pour beaucoup un guide sûr, maître de vérité chrétienne mettant au centre de sa réflexion, de son activité et de sa vie le Christ, révélateur de Dieu qui est amour. 

P. Jean-Jacques Flammang scj


[1] Montrer aux hommes le chemin qui mène au Christ. Mélanges offerts à Mgr André Léonard à l’occasion de son 80e anniversaire. Etudes réunies par Eric Iborra et Isabelle Isebaert. Paris, Artège Lethielleux, 2020. 670 pages. ISBN 978-2-249-91046-3 

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